Je viens d’achever la lecture du Chef-d’œuvre de Michel Houellebecq, de
Didier Goux, lecture dont je me suis régalé. C’est un livre qui réussit à être
à la fois drôle, émouvant, triste, optimiste, mélancolique et encourageant :
il n’y en a pas tant que cela qui puissent mériter tous ces qualificatifs.
Nous y suivons les destinées croisées de
trois principaux personnages : Evremont, auteur de romans de gare, d’âge mur et
célibataire ; Jonathan, étudiant en pharmacie rongé par la frustration ;
et le jeune et dynamique Charlie, fils d’épicier arabe. Chacun de ces
personnages suit sa propre trajectoire et charrie avec lui sa propre
atmosphère, de sorte que si le Chef-d’œuvre
était un opéra je pense qu’il serait judicieux d’attribuer à chacun d’eux un
genre de Leitmotiv : un air primesautier pour Charlie, quelque chose de
lent et d’un peu grave, mais sans excès, pour Evremont, et quant à Jonathan,
voyons voir, peut-être des notes discordantes de violon ? Mais peut-être ne
devrait-on pas s’essayer aux métaphores musicales lorsque l’on est aussi peu
savant en fait de musique que je le suis.
En tout cas, je crois bien que Goux aime
tous ses personnages. Il arrive à communiquer au lecteur de la sympathie pour
chacun d’eux, même lorsqu’ils sont un peu minables, auquel cas la sympathie se
fait pitié. Le Chef-d’œuvre n’est pas
un pamphlet et Goux ne se drape jamais dans la toge criarde de l’auteur engagé.
Si Jonathan ne saurait, somme toute, recueillir l’approbation du lecteur, c’est
parce qu’il s’engage dans une voie morbide d’autodestruction et non parce que l’auteur
chercherait à nous faire la morale. Bien sûr, Goux rit à gorge déployée des petits
et grands ridicules de notre modernité : les commandos de clowns citoyens
qui sillonnent la ville pour y mettre du vivre-ensemble ; la digital mother à l’écoute de ses kids ; les grand-mères en
trottinette ; les réactionnaires experts en bons restos… Mais il en rie
sans s’irriter : en somme, il s’en amuse.
Le titre n’est pas, soulignons-le, un
attrape-gogo pour attirer l’acheteur inattentif : il est pleinement
justifié. Houellebecq apparaît d’ailleurs bel et bien dans le roman en qualité
de personnage et, sans l’avoir jamais rencontré, je trouve la manière dont Goux
l’a dépeint très convaincante : elle répond bien à l’idée que l’on peut se
faire d’Houellebecq, d’après ses livres et ses apparitions publiques. Je serais
curieux de savoir ce que le véritable Houellebecq aura pensé de cela.
Enfin, pour le Cussimontain que je suis, il est tout à fait plaisant de voir l’action du roman située
dans les rues de Montcosson, que je puis reconnaître. La dernière fois que je
me suis rendu au bord du fleuve, je n’ai pu m’empêcher de chercher des yeux la
cuvette naturelle, dans la berge à pente douce, où débutent les amours de
Charlie et de Tosca. Lorsque l’auteur aura conquis la célébrité qu’il mérite,
renommer la ville, à la manière d’Illiers-Combray, s’imposera !
J'ai hâte de le lire!
RépondreSupprimerVous ferez bien.
Supprimer« Houellebec apparaît d’ailleurs bel et bien dans le roman en qualité de personnage »
RépondreSupprimerEt, en plus, il apparaît avec son Q…
Pourrait pas s'écrire comme Caudebec et le Bec-Hellouin, cet oiseau-là ? C'est que je suis normand de souche, moi ! J'ai des atavismes !
SupprimerVous l'avez acheté ? Vous êtes fou.
RépondreSupprimerA lier.
SupprimerBah ! Didier est fou à lire...
SupprimerTenez, je vous repasse le jambon persillé !
RépondreSupprimerAh non, carrément le sanglier rôti, avec un coup de rouge ! C'est qu'on est pas des mesquins, nous !
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